Ce mercredi 27 mai, la Commission de la Défense nationale examinera la proposition du gouvernement de réengager des avions de chasse F-16 belges dans l’opération « Inherent Resolve » (OIR) en Syrie pour une période d’un an. Cette proposition fait suite à la demande des Etats-Unis, de voir déployer des avions de chasse belges en Syrie et en Irak pour des missions de reconnaissance ainsi que des opérations d’attaque et de soutien aérien aux troupes au sol.
Par la présente, nous nous permettons de marquer notre surprise quant au timing particulièrement inopportun de la discussion que vous allez avoir. Ce timing est d’abord celui de l’urgence induite par la crise planétaire liée à la lutte contre la Covid-19, à laquelle la population syrienne est également confrontée, à l’intérieur d’un pays meurtri par près de 10 de conflits. Nous nous interrogeons, en outre, sur le fait qu’aujourd’hui encore, les mêmes recettes militaires continuent d’être envisagées alors que certains développements récents du conflit augmentent les risques de confrontations internationales. Enfin, depuis le mois de novembre, les efforts des Nations Unies pour trouver une solution politique au conflit montrent certains résultats qu’il conviendrait, d’abord et avant tout, de soutenir.
En tant que mouvement pour la paix, nous souhaitons donc exprimer nos réserves quant à une nouvelle éventuelle participation belge à cette mission militaire.
- 1. Par principe, nous nous opposons à la participation à une opération extérieure qui n’est pas couverte par le droit international, en particulier par une résolution claire du Conseil de sécurité des Nations Unies ou qui serait engagée à la demande du gouvernement concerné. L’intervention militaire de la coalition internationale en Syrie est, depuis le départ, contraire aux dispositions de la Charte des Nations Unies. Cette conformité au droit international est pourtant supposée, depuis longtemps, être une condition sine qua non en Belgique, pour l’engagement de son armée à l’extérieur de ses frontières.
- La participation à une telle mission de combat se confronte également – et érode – l’appel lancé par le Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres le 23 mars dernier en faveur d’un « cessez-le-feu mondial immédiat » afin de concentrer toute l’attention et tous les moyens vers la lutte contre la pandémie de COVID-19. L’envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie, Geir Pedersen, a également lancé un appel clair en faveur d’un cessez-le-feu « total » et « immédiat » dans toute la Syrie, vu l’urgence humanitaire liée à la crise sanitaire.
- Nous demandons à la Belgique, en tant que membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, de déployer tous ses efforts pour que la population affectée en Syrie ait un accès suffisant à l’aide humanitaire. Dans ce contexte, il est primordial que la résolution 2504 soit renouvelée, afin que le libre accès aux postes frontières et aux zones de conflits reste garanti même après le 10 juillet 2020. Parallèlement, il est crucial de soutenir autant que possible les efforts politiques des Nations Unies et les négociations sous son égide au sein de la commission constitutionnelle. Une nouvelle participation militaire de notre pays à cette opération illégale pourrait saper la légitimité politique de notre pays aux yeux de certaines des parties belligérantes.
- A l’instar des précédentes opérations de combat aérien, le risque de pertes civiles est élevé. Nous rappelons à cet effet que l’intervention militaire de la coalition internationale en Syrie est responsable d’au moins 8 250 victimes civiles confirmées, selon l’organisation Airwars. A cet effet, il convient de rappeler que les précédentes missions de combat aérien belges en Irak et en Syrie souffraient d’un manque total de transparence. Un manque qui rend, évidemment, le contrôle et l’évaluation politiques très difficiles, voire impossibles.
La participation belge à une nouvelle mission de combat en Syrie nous apparaît donc extrêmement problématique et indésirable. Comme l’a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, le 21 février 2020 : « Le message est clair. Il n’y a pas de solution militaire à la crise syrienne. La seule solution possible est une solution politique ». Nous espérons que vous pourrez rendre justice à cette déclaration en permettant de concentrer tous les efforts de la Belgique vers une situation pacifiée en Syrie. Dans cet espoir, nous restons à votre disposition pour en discuter plus avant et vous remercions pour l’attention que vous aurez bien voulu porter à la présente.
Agir pour la Paix, CNAPD, CSOtan, intal, MCP, Pax Christi Vlaanderen et Vrede vzw.