Halte aux assassinats aux Philippines

Plusieurs organisations se réunissent aujourd’hui devant l’ambassade des Philippines en Belgique pour exprimer leur inquiétude, leur frustration et leur indignation face à la crise des droits humains qui sévit actuellement aux Philippines.

Voici leur déclaration :

Alors que les exécutions extrajudiciaires, les arrestations illégales et le harcèlement de défenseur·se·s des droits humains et environnementaux, de travailleur·se·s du développement, de syndicalistes, d’avocat·e·s, de juges, de journalistes et d’hommes et de femmes politiques de l’opposition se poursuivent sans relâche, nous sommes continuellement inquièt·e·s pour la sécurité de nos ami·e·s et collègues aux Philippines, sachant que les menaces de mort reçues par nombre d’entre elleux de manière régulière sont loin d’être vaines.

Quelqu’un·e a récemment fait remarquer que Facebook commençait à ressembler à une rubrique nécrologique. En effet, fort malheureusement, nous nous sommes réuni·e·s à plusieurs reprises rien qu’au cours de ces derniers mois pour exprimer notre chagrin et notre indignation face à l’assassinat d’un·e autre militant·e, et pour déclarer notre solidarité avec les victimes de violations des droits humains et leurs familles. À chaque fois, nous étions bien conscient·e·s que ce ne serait pas le dernier rassemblement de ce type, car d’autres de nos ami·e·s avaient déjà été prévenu·e·s qu' »iels seraient les prochain·e·s ».

En qualifiant régulièrement les critiques du gouvernement et les défenseurs des droits humains de « terroristes », le président Duterte les menace de peines de mort. Son manque de respect flagrant pour les droits humains a été démontré une fois de plus début mars lorsqu’il a appelé les forces de l’État à « Tuer tous les communistes. Achevez-les. Ne vous souciez pas des droits humains » . Peu de temps après, le 7 mars renommé « dimanche sanglant », neuf défenseur·se·s des droits humains non armé·e·s ont été brutalement assassiné·e·s et six autres arrêté·e·s lors d’opérations conjointes de la police et de l’armée dans la région sud de Tagalog. Le 28 mars, un dirigeant syndical, Dandy Miguel, a été abattu et plusieurs autres militant·e·s ont été arrêté·e·s.

L’intensification de la répression de l’opposition démocratique et des défenseur·se·s des droits humains s’appuie sur une base légale ratifiée par le gouvernement Duterte, notamment l’ « Order 70 », la mise sur pied du «Groupe de travail national pour mettre fin aux conflits armés communistes locaux (NTF-ELCAC) » et la loi antiterroriste.

Nous sommes profondément préoccupé·e·s par l’Etat de droit et le système judiciaire aux Philippines. 61 avocats ont été tué·e·s depuis l’arrivée au pouvoir de Duterte en 2016, dont nombreux·ses dans le cadre de leur travail de défense des militants. Nous sommes particulièrement choqué·e·s par le meurtre d’un témoin clé du massacre de Tumandok et la tentative de meurtre d’un avocat représentant des personnes arrêtées à cette occasion. Récemment, un juge a été mis à l’index pour avoir abandonné des accusations forgées de toutes pièces contre des militants, et il est arrivé que des tribunaux locaux délivrent des mandats de perquisition qui ont donné lieu à des violations flagrantes des droits humains.

La Cour suprême des Philippines a vivement critiqué les attaques contre les avocat·e·s, déclarant : « S’attaquer au pouvoir judiciaire, c’est ébranler le fondement même de l’État de droit ». Nous nous demandons dès lors : si les avocat·e·s disparaissent – soit tués, soit intimidés au point de ne plus oser représenter leurs client·e·s – qui défendra les défenseur·se·s des droits humains ?

Au vu de la situation affligeante et inacceptable de piétinement des droits humains par l’administration Duterte, nous :

  • Demandons instamment au gouvernement des Philippines de mettre fin à l’escalade des violations des droits humains et au climat d’impunité qui encourage ces atrocités,
  • Amplifions les appels de la société civile philippine en faveur de l’abrogation de la loi antiterroriste et de la suppression du NTF-ELCAC.
  • Appelons à la mise en œuvre des recommandations du rapport 2020 de la 44e session du CDH de Michelle Bachelet, Haute Commissaire des Nations Unies aux droits humains ; y compris les mécanismes de responsabilité internationale tels que l’établissement d’une enquête indépendante sur la situation des droits humains aux Philippines.
  • Soutenons et appelons au soutien d’initiatives de la société civile mondiale telles que la campagne « Investigate PH » en cours, qui vise à appuyer le rapport Bachelet en fournissant des informations actualisées sur les violations des droits humains aux Philippines.
  • Espérons que le Congrès philippin fera de la législation relative à la protection des défenseur·se·s des droits humains une priorité.

Signataires :

intal
QUINOA asbl
UPB (UGNAYANG PILIPINO SA BELGIUM)
SamaSama
Viva Salud
ICHRP-EUROPE
11.11.11
Entraide et Fraternité Friends of the Earth Europe
ACV Puls
Progress Lawyers Network
Solidagro
Anakbayan Europe

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