Jules César Peluffo- TW @Julio_Peluffo- Doctorant en économie du secteur public, Université de Salerne
Traduit par: Juan David Plaza Osses. Doctorant en Sciences Politiques. Sciences Po Bordeaux
Le 21 novembre restera dans l’histoire de la Colombie le jour de la plus importante manifestation civique contre un gouvernement. Importante du fait de l’ampleur des secteurs qui ont participé ainsi qu’au regard du nombre de personnes qui sont descendues dans la rue (entre 6 et 7 millions selon les calculs les plus réduits).
La politique économique des derniers gouvernements ainsi que les recommandations de l’OCDE et les violations répétées du gouvernement face au processus de paix et aux organisations indigènes, étudiantes et syndicales sont les principales motivations des citoyens à l’origine de la grève. En voici les 7 raisons les plus importantes.
Sécurité sociale. Une réforme qui vise à modifier le système public d’administration des retraites (régime de solidarité des primes moyennes), par un régime d’épargne individuel. Cette proposition est contraire aux principes de solidarité, d’universalité et d’efficacité du droit à la sécurité sociale promus par la Constitution politique.
Processus de paix. Les manifestants accusent le gouvernement de ne pas appliquer rigoureusement les accords mettant fin au conflit avec les guérillas des FARC, y compris les plans économiques et sociaux prévus pour les zones historiquement les plus touchées par le conflit et le manque de protection des démobilisés.
Privatisations. Le gouvernement avance un plan visant à ouvrir le chemin de la privatisation de 19 entités financières de l’Etat, en plus des 20% restants des actions de la compagnie pétrolière d’Etat (Ecopetrol) et du quota d’État des sociétés ISA (énergie) et Cenit (transport d’hydrocarbures).
Droits de l’homme. L’absence de protection de la part du gouvernement contre les menaces croissantes des secteurs paramilitaires et les assassinats systématiques de dirigeants sociaux dans les régions rurales de la Colombie sont une source d’indignation et de protestation au niveau national. S’y ajoutent les récents scandales liés au meurtre de 18 mineurs dans un attentat à la bombe contre l’armée nationale, qui a contraint le ministre de la Défense à démissionner.
Non-respect des organisations sociales. Les organisations autochtones, syndicales et étudiantes ont conclu des accords avec le gouvernement au cours des jours précédents de manifestation. Aujourd’hui, ils dénoncent l’infraction systématique du gouvernement des accords signés. Les organisations agricoles exigent la révision des accords de libre-échange (ALE). De leur côté, les organisations pour les droits des femmes exigent des mesures concrètes pour lutter contre les discriminations.
Réforme du travail. Une réforme du travail présentée par le parti gouvernemental envisage de développer la flexibilité du travail et de détériorer les conditions de travail, telles que le taux horaire et les annonces des secteurs d’activité liés au gouvernement, telles que le versement de 75% du salaire minimum aux jeunes.
« Fracking », « paramos » et environnement. Le gouvernement a avancé des mesures visant à rendre possible la méthode de fracturation hydraulique pour l’extraction de pétrole en dépit des risques environnementaux très élevés de cette mesure (non-respect des promesses de sa campagne). A également été autorisée l’exploitation minière des páramos (l’exemple de Santurban, Santander). Ceci constitue une autre raison de la mobilisation des secteurs et des organisations environnementales à travers le pays.
La réaction du président et du parti au pouvoir au cours des jours qui ont précédé la manifestation a été de stigmatiser le mouvement, de disqualifier les dirigeants sociaux qui la convoquent et de militariser les principales villes. Ses déclarations à la suite de la journée de manifestation ont complètement ignoré le contenu des revendications des manifestants.